Écrits par: Quinton Jacobs
Images: Jen Ng  & Dhani Oks

Ça fait maintenant quelques semaines que nous sommes revenus, et l’ampleur de ce que nous avons accompli commence à nous frapper. J’imagine que nous continuerons à réfléchir sur le sens véritable et profond de ce voyage pour les années à venir, mais pour l’instant, en voici quelques bribes qui allègent le cœur et l’esprit…

Nous avons couru, ensemble, en équipe, de Toronto à New York.

Cette communauté que nous avons assemblée avait pour objectif de faire connaitre et amasser des fonds pour Skylark, une organisation caritative de Toronto dédiée à la cause des enfants, jeunes et familles aux prises avec des troubles de santé mentale, et autres besoins développementales. C’est cette vocation à œuvrer pour la santé mentale des gens qui est venue nous chercher. Jusqu’à maintenant, notre initiative a amassé près de $15,000, et la plateforme de donation restera ouverte jusqu’en fin d’année.

Depuis ses origines, « Escape to New York » (E2NY) s’annonçait comme une aventure unique, mais tout aussi éprouvante. Mais plus nous nous faisions à l’idée, plus notre intention se focalisait. La distance, la frontière, de courir le long des Finger Lakes, les difficiles collines suivant Ithaca, mais aussi le Marathon de New York qui nous attendait deux jours après notre arrivée. New York, notre destination, débordait de nouveaux défis, de territoires inexplorés. L’opportunité était trop belle pour ne pas la prendre.

Côté projet, toutefois, nous ne pouvions suivre un horaire journalier exact. La course à relai est, certainement, plutôt simple, et bien souvent même monotone, mais toute la logistique qui l’accompagnait était complexe et implacable. Il n’y avait pas d’horaire fixe, de temps mort. Aucun chauffeur attitré à conduire les VRs ou les véhicules de soutient. Et certainement, aucune façon de s’assurer de l’état de santé physique, mentale et émotionnelle des membres de l’équipe, surtout lors des étapes avancées de l’épreuve.

Ce que nous avions par contre, avec certitude, ce sont les 28 acteurs de cette aventure, 28 parties mouvantes devant être le centre de nos considérations pour 3 jours et 3 nuits, 24 heures par jour. 28 personnes qui se fatiguaient, devenaient irritables, et après quelques jours à courir, plutôt malodorantes… Mais aussi, et surtout, des gens qui partageaient une énergie spéciale, et une inspiration constante à chaque moment de l’aventure.

Le départ est donné le 29 octobre, un mardi soir, à 18:45, devant nos proches, amis, familles et supporters, à la base de la tour du CN. Certains sont même venus prêts à courir les premiers 10km avec nous.

À partir de là, 900km nous attendaient, séparés en 90 segments couverts par un alignement de coureurs qui n’arrêteraient qu’une fois notre destination atteinte.

Nous avions à cet effet, en quelques sortes, 90 lignes d’arrivée, 90 célébration de la détermination de chacun, 90 opportunités de laisser nos propres sentiments de côté, l’instant d’un moment, pour célébrer et « élever » l’accomplissement d’un coéquipier, avec toute notre vigueur encore disponible, et encore plus.

La raison pour laquelle E2NY a été différente des autres courses d’ultra-relais n’a rien à voir avec la course, mais plutôt avec la magie qui s’opérait à chacune de ces transitions.

Dès qu’un coureur atteignait la fin de son segment, nous courrions à nos manteaux, cloches et flutes, juste avant de sortir en trombe des VR pour l’accueillir.

(Toutes nos excuses aux habitants de Shoreacres, près de Burlington, Vermont, qui lisent ces lignes. J’imagine que l’arrivée d’un cirque en ville à 2h du matin le 30 octobre était particulière. C’était nous haha!)

Nous avons tenu cet élan jusqu’à New York.

Des quartiers résidenntiels aux champs. Sous le soleil automnal intense et les orages sans pitié accompagnés d’alertes d’inondations. À travers même ces embuches imprévisibles, comme lorsque l’un de nos VR c’est retrouvé dans le paysage, en attente d’une remorque.

Toute l’équipe a persévéré, de cette façon qu’ont les athlètes de persévérer, mais c’est cette étincelle qui accompagnait chacun de ces instants de persévérance qui a fait d’E2NY une expérience unique.

Je dis « nous ». « Nous avons couru… », mais la vérité, c’est que je n’ai pas couru du tout. Après plus d’un an à planifier cette aventure avec mon cofondateur, Andrew Abley, j’ai déchiré mon tendon d’Achilles à quelques semaines du départ de l’épreuve. Aussi simplement que ça. Ma participation s’est adaptée. J’ai évidemment décidé de persévérer avec l’équipe, et l’expérience aura été celle d’une vie, sans même avoir couru un pas.

Nous disions dès le départ que notre objectif était d’inspirer la connexion humaine entre les gens.

Tout au long du trajet, l’accent n’était pas sur la distance exorbitante à couvrir à pied, mais plutôt sur les gens impliqués, et l’énergie qui se dégageait du groupe.

L’épreuve n’était d’ailleurs que l’aboutissement d’un parcours parsemé d’efforts et de ressources mises à profits dans la création d’une communauté, et d’évènements caritatifs en support de Skylark. Ces évènements ont servi de tremplin pour conscientiser et supporter financièrement cette organisation qui fait tant de bien dans notre communauté, mais aussi tout autant d’opportunités pour rire, s’activer et s’émerveiller avec des gens aussi excités que nous à l’idée de notre projet. Ces gens qui, par leur amour et leur support, ont ultimement été la plus grande part et la plus grande réussite de cette aventure.

Il y a cette philosophie sud-africaine, le « Ubuntu », qui se réfère à la croyance que nous sommes définis par notre compassion et notre bonté envers les autres, qu’au final, nous existons pour être ensemble.

Les 900km de E2NY, ce n’était que le mécanisme. Mais ma fierté, en tant que fondateur de cette aventure, c’est qu’elle s’est construite d’abord et avant tout par la communauté.

Much Love,

Q